La fin des certitudes
En tant que catégorie théologique, le miracle ne peut donc être reconnu que par une autorité religieuse, sans quoi il reste un prodige. En dépit des progrès scientifiques, les miracles continuent d’être acceptés par de nombreux croyants comme autant de preuves, ou de signes, de l’existence de Dieu. Faut-il y voir une forme de superstition ou la résistance à un certain « désenchantement » du monde ? C’est que les frontières du savoir ne cessent de changer, et les progrès de la connaissance au XXe siècle notamment ont finalement conduit à une « fin des certitudes », comme l’a théorisé le chimiste Ilya Prigogine, prix Nobel en 1977. Plus la science en connaît sur le monde, et plus elle constate qu’il lui en reste à connaître, à l’instar des conceptions récentes en cosmologie qui nous expliquent sans trop s’en vanter que la matière visible ne constitue de 4 % de l’univers, quand le reste serait constitué à 24 % d’une mystérieuse « matière noire » et d’une non moins étrange « énergie sombre » pour 72 %. La physique quantique de son côté donne raison à Kant en expliquant que le « réel en soi » nous échappe et que nous n’accédons qu’à l’information que nous pouvons extraire sur notre relation aux objets quantiques. La notion de conscience elle-même est essentielle à cette relation et constitue pour les neurosciences contemporaines le « problème difficile », selon le philosophe David Chalmers. Ainsi, plus nous en savons, moins nous en savons, et le miraculeux peut continuer d’exister dans cet espace. On peut tout aussi bien, comme le fait le « matérialisme de promesse », estimer que les progrès scientifiques finiront par l’évacuer pour de bon, reléguant le « surnaturel » à notre ignorance de la veille. Ou alors ces progrès donneront-ils raison à Jésus qui affirmait que la foi en le Père autorisait tout un chacun à faire des miracles, guérisons ou autre déplacements de montagnes. Comme Einstein ou Voltaire, on verrait alors que le miracle est partout ou bien il n’est nulle part.